Ce matin-là, comme beaucoup d’autres, je n’avais pas eu le courage de me lever à 6h45 pour me préparer avant d’accompagner A. à l’école. Je fais partie de ces mamans qui arrivent souvent à l’école les cheveux en bataille en sentant le savon de Marseille et le dentifrice à plein nez. C’était un de ces matins-là.
Elle était grande, élancée. Elle portait un manteau noir et une écharpe violette qui m’a fait regretter de ne pas l’avoir achetée en soldes l’hiver dernier. Ses cheveux longs, épais et brillants, étaient attachés en queue de cheval haute. Même ses cheveux se balançaient avec élégance. Elle était suivie d’un mari parfaitement assorti. Il portait un sac en cuir vieilli comme on rêve d’en hériter d’un grand-père argentin joueur de polo, un vieux modèle de La Martina.
Le couple parfait.
Je marchais vite et les ai rattrapés rapidement. Là, sur le trottoir, tout en avançant, ils déversaient toute leur insatisfaction. Presque en harmonie.
En écoutant les mots échangés, saccadés, presque crachés, j’ai pensé aux personnages des romans de Laurie Colwin et de James Salter, à leurs apparences bien lisses qui cachent des fêlures insondables. Les “heureux et damnés” de Fitzgerald.
Je me suis éloignée encore plus rapidement en regrettant presque de me dire qu’il faut toujours se méfier de tout ce qui est trop parfait.
Dans la rubrique “Cuisine”, plusieurs découvertes délicates, “presque” parfaites. Les produits Dalesfordorganic dont la Grande Epicerie propose une sélection : j’ai goûté à leur ketchup et à leurs petticoat tails, delicious. Et puis, j’ai adoré cette entrée au Market, des morceaux de thon frais entourée de pousses d’épinards à peine blanchies puis d’une pâte filo aérienne servis comme des makis à tremper dans une purée de fèves fraîches salée avec des petites gouttes de sauce soja. Je me serais volontiers resservie . Et enfin, ma très réussie Pumpkin Pie. Elle n’était pas des plus présentables (et nettement moins jolie que celle de Vanessa, désormais nommée mon experte en tartes maisons) mais elle était délicieuse.
J’ai suivi au gramme près la recette de Vanessa, même pâte brisée à la farine complète, même appareil, si ce n’est que n’ayant pas de pumpkin can que j’aurais volontiers utilisé, j’ai utilisé la chair d’un potimarron, une fois cuit et réduit en purée, il en restait 450 g.
Pour un petit test comparatif par une spécialiste : fresh pumpkin vs. canned pumpkin à lire en dégustant la tarte encore tiède.
Bon, ne me demandez pas comment je me suis retrouvée devant une caméra à cuisiner de l'avocat que je n'aime pas (trop), maquillée comme un camion, ce serait un peu long à expliquer.
On a beau les critiquer ces anciens cafés PMU qui deviennent du jour au lendemain après un relooking discret des places-to-go, moi, j’adore m’y poser de temps autre pour y boire un verre. Ils s’appellent, à Paris, le Rendez-vous des amis, la Perle, les Pères populaires...
Celui de mon quartier s’anime véritablement vers 18h.
Ce soir, les places sont chères. Le café à un euro ou le verre de Merlot à deux euros ne le sont pas. Lien de cause à effet pour certains.
Deux jeunes du lycée voisin terminent leur partie d’échecs. Ils seront très vite remplacés par une jungle composée majoritairement de designers en devenir et d’intermittents du spectacle. La plupart mangent bio. La serveuse ressemble à Grace Jones.
A côté de moi, une femme un peu fatiguée sirote à la paille son GG (Cocktail Gin, Jus de goyave, Champagne), elle se plaint de sa fille de quinze ans qui lui demande de rendre mensuellement des comptes sur sa recherche d’emploi. On peut donc être adolescent et s'intéresser à la macro-économie.
J’ai de la chance, A., pour le moment, est admiratif : je sais dessiner Babar et construire sa ferme Lego.